Du bloc d’argile à l’objet du quotidien : les étapes de création d’une pièce en céramique

24 mars 2025

Sophie Anglade

La céramique est un art ancestral qui transforme un simple bloc d’argile en une pièce unique et fonctionnelle. Chaque objet, qu’il s’agisse d’une tasse, d’un bol ou d’une assiette, suit un processus minutieux où patience et savoir-faire se rencontrent. Voici les étapes essentielles de création d’une pièce en céramique artisanale.

1. La préparation de l’argile : donner vie à la matière

Avant toute chose, l’argile doit être préparée. Cette étape consiste à la malaxer et la débuller afin d’avoir une terre de consistance homogène, de ré organiser les microparticules, d’enlever les poches d’air qui pourraient compliquer la façon sur le tour de potier ou fragiliser la pièce lors de la cuisson. On utilise la technique du « battage » – la technique du bélier – ou du « pétrissage en spirale » – la technique du coquillage ou escargot -. Il est dit qu’il faut le faire une centaine de fois à chaque balle, c’est dire son importance ! 

Je ne compte pas personnellement mais je le fais un certain nombre de fois selon si la terre est recyclée ou si le pain neuf a été bien préparé en usine ; sans jamais trop la fatiguer !

2. Le modelage ou le tournage : façonner la forme

Deux techniques principales permettent de donner forme à la pièce :

  • Le tournage : l’argile est centrée sur un tour de potier et travaillée avec les mains pour obtenir des formes symétriques et régulières, permet plus facilement le travail en série grâce à cette girelle (plateau en acier) qui tourne de manière électrique ou manuelle.
  • Le modelage : technique plus libre où la pièce est construite à la main grâce aux techniques du colombin, de la plaque ou par pinçage, offrant une grande variété de textures et de formes plus organiques.
  • Les deux peuvent être combinés bien-sûr, pour encore plus de possibilités et ouvrir le champs des possibles !!

3. Le séchage : une phase d’attente essentielle

Une fois façonnée, la pièce doit sécher lentement et uniformément pour éviter les fissures. Cette phase peut durer plusieurs jours selon l’humidité ambiante et l’épaisseur de la céramique. L’objet atteint alors l’état de « consistance cuir », prêt pour les finitions.

4. Les finitions : perfectionner les détails

Une fois sèche mais encore assez tendre, la pièce peut être terminée : retouchée, lissée ou gravée. Si c’est une pièce tournée, c’est le moment du tournassage ! Avec des outils qu’on appelle les mirettes et tournassins, on va venir enlever le surplus de terre (surtout au pied, au cul de la pièce comme on dit !). Donner le galbe à la pièce et faire un pied. Tout cela donne des tournassures qui seront recyclées.

C’est aussi à ce stade qu’on peut ajouter des anses – le garnissage -, des reliefs ou des décors en engobe (barbotine colorée appliquée sur la terre crue). A l’origine ces engobes étaient faits d’une autre terre (et un ajout d’eau pour obtenir une pâte plus ou moins liquide) que celle travaillée afin d’y apporter une autre couleur. Maintenant il y a les colorants de masse ou les oxydes métalliques qui permettent encore plus de possibilités de couleurs ! On peut les acheter ou les faire soi-même. A l’atelier vous utiliserez des couleurs que j’ai cherché et testé afin d’avoir une palette de couleurs qui me plaît.

5. La première cuisson : la transformation en biscuit

Après un séchage complet, durée incompressible, la pièce est cuite une première fois à environ 980-1000°C. Cette cuisson qui dure une douzaine d’heures, appelée dégourdi pour le grès (biscuit pour la faïence), solidifie la céramique tout en la laissant encore poreuse pour absorber l’émail. C’est à ce stade qu’on peut apposer d’autres types de décors : les crayons d’oxydes ou les jus d’oxydes ! Et oui… encore des possibilités !

6. L’émaillage : apporter couleur et profondeur

Après cette première cuisson, la pièce peut être plongée dans un bain d’émail, ou pulvérisée grâce à un pistolet ou encore peinte (l’émail est un mélange de matières premières qui à une certaine température de cuisson se vitrifie et donnera l’aspect final : mat, brillant, satiné, transparent ou coloré). Ces émaux peuvent être achetés tout prêts (liquide), ou en poudre puis mélangée à l’eau. Ou bien ils peuvent être faits entièrement par le céramiste potier suite à de multiples recherches et tests, il faut pour cela comprendre un minimum la chimie et l’interaction entre les différents oxydes…!

7. La seconde cuisson : la touche finale

L’émaillage doit être fixé lors d’une seconde cuisson qui elle dure selon sa courbe entre 7h et plus de 12h , appelée cuisson haute température (entre 1240 et 1300°C pour le grès et la porcelaine). Sous l’effet de la chaleur, l’émail (fait entre autres de silice et d’alumine) fusionne et la céramique devient imperméable et résistante.

Il est à noter que la monocuisson existe aussi, il est plus facile et plus sûr dans ce cas de poser l’émail en pulvérisation sur la pièce mais pour cela il faut être équipé idéalement d’une cabine d’émaillage ! et bien se protéger 😉

Et qu’à chaque cuisson il faut attendre que le four refroidisse naturellement idéalement jusqu’à 50° c’est pour cela qu’on compte en général quasi 48h au total lors d’une cuisson !!

8. L’ultime vérification et l’adoption !

Une fois refroidie, la pièce est soigneusement contrôlée : vitrification, textures, couleurs et finitions doivent être au mieux. Elle est alors prête à rejoindre un quotidien, votre quotidien ! Le plaisir de boire et de manger dans une vaisselle artisanale est un petit bonheur au quotidien !

Conclusion : un processus artisanal au service du quotidien

Derrière chaque objet en céramique se cache un long travail de transformation, mêlant patience, savoir-faire et passion. Chaque pièce raconte une histoire et est unique, de l’argile brute à l’objet du quotidien, offrant à celui qui l’adopte une part de cet artisanat unique et intemporel.

Et vous, quelle pièce de céramique fera partie de votre quotidien ?